Gazouz → Abo Sahar ◦ Liliane Chlela ◦ Ayrisis ◦ Phil Battiekh
Après six éditions dont deux tournées, Bisque revient décapsuler une Gazouz croisant trois pôles des souterrains sonores du MENA : l’assourdissant label cairote HIZZ avec Abo Sahar et KZLK, la dark phonk tunisienne de Hrizen et l’électronique ténébreuse de Liliane Chlela. Agencé en un bourbier familial liant Pan African Music Magazine et la BIG, cette édition proposera un drift dans les entrailles sonores de mouvements prônant la déconstruction à outrance jusqu’à l’annihilation des poncifs esthétiques propres à «l’oriental clubbing» et autres «wolderies de cabine d’essayage». Post-Shaabi, Harsh-Shaabi, Craft beats nimbés de field recording, au total s’agenceront comme un drift dans le nihilisme d’une génération qui broie ses repères pour mieux dépasser le cloisonnement d’une société en proie à l’absurdité de ses contradictions et la désillusion de sa vague révolutionnaire.
ABO SAHAR ◦ Live | Égypte
Poussant la spontanéité sonore jusqu’à sa plus «balec» déclinaison, Abo Sahar incarne l’essence même du DIY égyptien. Aucunement par conviction ou posture, mais par nécessité, puisqu’à défaut de pouvoir s’offrir un clavier et ambiancer les mariages de son village (Minya), c’est avec celui d’un ordi suranné (écran + unité centrale : la totale) et d’un software craqué que ce dernier s’est donné pour mission de dépecer les musiques populaires d’Égypte pour créer son propre courant. Le nom : Trobby Music. La démarche : piocher dans chaque son qui lui passe par l’oreille pour croiser les références. En ressort un univers syncrétique, synthétique et gesticulatoire habité par des compos frénétiques et bancales. Le tout au croisement d’une playlist de cabaret miteux, d’une caricature de trap, d’une BO de White Party, d’un Mawled (fête religieuse célébrant la naissance du prophète musulman) sous kéta, d’un jingle de la BBC et bien plus encore… Certainement un des plus prolifiques soudards sonores que compte la rue arabe.
LILIANE CHLELA ◦ DJ set | Liban
Productrice, DJ et performeuse, Liliane Chlela est connue sur les scènes électroniques et expérimentales pour son approche tractopelle du son, incitant souvent le public à pousser un peu plus loin les limites de sa convulsion auditive. Avec ses propres techniques, elle explore les liens entre l’improvisation et la manipulation sonore en abordant de nombreux genres musicaux. Après trois albums autoproduits, son plus récent, «Safala», mêle enregistrements sur le terrain, souvenirs et incantations à des sons novateurs et déstabilisants ; l’œuvre a d’ailleurs été présentée en première au Tusk Festival au Royaume-Uni. Son penchant pour la transdisciplinarité a mené Chléla à développer des compétences auditives et visuelles pour les appliquer à des domaines aussi différents que les films de mode, les installations interactives et l’art de la performance. Forte de cette palette sonore variée et aventureuse, l’artiste libanaise est devenue l’une des productrices et musiciennes les plus polyvalentes du Moyen-Orient, de l’Asie occidentale et de l’Afrique du Nord. Au cœur de cette performance, les rythmes électroniques sombres et implacables se mêlent à la colère et à l’angoisse. Pour «Safala», Liliane Chléla a puisé dans ses souvenirs pour donner naissance à une concoction sonore ancrée dans les épistémologies orales héritées de ses ancêtres, sur fond de séquences filmées obsédantes et d’une conception graphique signées par le studio Kawakeb de Beyrouth.
Phil BATTIEKH ◦ DJ set | Bâle – Le Caire
Importateur agrée de Mahragan depuis l’existence du genre (tournant électronique, grime et core du shaabi égyptien), Phil Battiekh s’est imposé comme l’un des faisceaux à travers lequel le mouvement s’est immiscé dans les souterrains sonores d’Europe.
AYRISIS ◦ DJ set | Istanbul – Lyon
Ex-antenne lyonnaise de Root Radio (ancienne résidente et programmatrice), tout droit débarquée du fourmillement d’Istanbul, Ayrisis distille des drifts sonores quelque part entre le sud et l’est de la rive méditerranéenne. Une virée à forte charge narrative et picturale dans laquelle teuf, causes et militantisme forment une même valse de BPMs.
[REPORTÉ AU 15.07] HRIZEN ◦ DJ set | Tunisie [REPORTÉ AU 15.07]
Plus qu’un blase, un péplum sauce tunisienne où DIY et mur perlé de poubelles forment le point de convergence d’une clique déprimée de Sousse. D’une déshérence hittistique, Toxic Gang voit le jour sous l’impulsion de Hrizen et du regretté Cheb Terro pour – au-delà du collectif – former une gangrène rongeant consciencieusement les repères cognitifs, visuels et sonores de leur prosaïque présent. En ressort un condensé de vandalismes qui – des mains de Hrizen – sonne comme de la phonk salement cathartique, chargée d’une noirceur qui fait écho à une génération désillusionnée par la révolution tunisienne au point de finir par twerker chez Daesh. Producteur et Dj, Hrizen constitue à ce jour l’une des plus disruptives pierres noires d’une scène tunisienne qui peine encore à se retrouver mais qui balance des gauches-droites dans la map du post-moderne sonore.
THEATRE DE L’USINE